Suites des arrêts du 13 septembre en matière de congés payés



  1. Application des décisions de la Cour de cassation par les Cours d’appel

Le 13 septembre, la Cour de cassation a rendu trois arrêts visant à mettre en conformité le droit français avec le droit européen en matière de congés payés. Elle considère désormais acquiert des congés payés durant les périodes d’arrêt de travail pour maladie ou accident de nature professionnelle ou non (cf. newsletter du 19 septembre).

Dans deux arrêts du 27 septembre et du 12 octobre, la Cour d’appel de Paris se prononce sur l’application de la solution dégagée par la Cour de cassation. Comme attendu, elle s’aligne sur la position de la Cour de cassation. Elle fait droit, dans ces deux affaires, aux demandes des salariés en condamnant les employeurs à verser une indemnité compensatrice de congés payés pour les périodes d’arrêt de travail des salariés. En effet, ceux-ci n’avaient pas bénéficié de congés payés au titre de ces périodes d’absence, ce qui est désormais illicite au regard de la jurisprudence.

De la même manière, la Cour d’appel de Reims fait application de cette solution dans un arrêt du 18 octobre. Elle précise à cet égard qu’il appartient à l’employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement ses droits à congés payés. Or, « en l’espèce, l’employeur ne peut en justifier puisqu’il dénie au salarié son droit à congé [pendant son arrêt maladie]. Par conséquent, il ne saurait y avoir de prescription ».

Ces deux arrêts offrent ainsi une première application pratique par les juges du fond de la nouvelle position de la Cour de cassation.

  1. Précisions de la Cour de justice de l’Union européenne

La Cour de justice de l’Union européenne, interrogée par le Conseil de prud’hommes d’Agen tempère néanmoins l’application de ces décisions dans un  arrêt rendu le 9 novembre 2023. En effet, elle affirme que « des limitations peuvent être apportées au droit fondamental au congé annuel payé » : « bien qu’un travailleur en incapacité de travail pendant plusieurs périodes de référence consécutives soit, en principe, en droit d’accumuler de manière illimitée tous les droits à congé annuel payé acquis durant la période de son absence du travail, un tel cumul illimité ne répondrait plus à la finalité même du droit au congé annuel payé ».

En ce sens, elle estime que le droit de l’Union européenne « ne s’oppose pas à des dispositions ou à des pratiques nationales limitant le cumul des droits au congé annuel payé par une période de report à l’expiration de laquelle ces droits s’éteignent, pour autant que la période de report garantisse notamment au travailleur de pouvoir disposer, au besoin, de périodes de repos susceptibles d’être échelonnées, planifiables et disponibles à plus long terme, et qu’elle dépasse substantiellement la durée de la période de référence pour laquelle elle est accordée ».

Au regard de cette décision, le législateur pourrait ainsi prévoir une période de report des congés payés à l’expiration de laquelle les droits s’éteignent.

Sources :

CA Paris, 27 septembre 2023, n° 21/01244

CA Paris, 12 octobre 2023, n° 20/03063

CA Reims, 18 octobre 2023, n° 22/01293

CJUE, 9 novembre 2023, n° C-271/22 à C-275/22, Keolis Agen