Le PER, nouvel eldorado de l’épargne retraite ?



Après un peu plus de 2 années d’existence, le per a pris une place de choix sur le marché de l’épargne retraite. Pierre-Emmanuel Sassonia, Président de la commission épargne salariale/ épargne retraite de PLANETE CSCA dresse un bilan pour La Nouvelle Revue du Courtage.

 

Le PER individuel semble avoir remporté un très large succès depuis son entrée en vigueur. Quel regard portez- vous sur ce succès ?

Une des ambitions de la loi Pacte était d’offrir aux épargnants un plan d’épargne retraite plus attractif avec une fiscalité favorable et une plus grande souplesse à la sortie (rente ou capital, possibilité de déblocage anticipé pour l’acquisition de sa résidence principale…). Ce nouveau PER vise aussi à remplacer tous les dispositifs existants par un seul et unique produit pour permettre aux épargnants d’avoir une meilleure visibilité sur leur préparation à la retraite. Les épargnants ont rapidement adopté ce nouvel outil qui leur permet de mettre en œuvre des stratégies personnalisées. De plus, avec la possibilité donnée de transférer les anciens contrats d’épargne retraite (PERP, Madelin) vers le PER, les épargnants ont pu rationaliser leur épargne. En moins de 2 ans, 2 millions de PER individuels ont été ouverts, presqu’autant que le nombre d’ouvertures de PERP en 15 ans !

Nous avons donc assisté à un véritable tsunami qui s’explique par le fait que pour une fois, la réforme répond à une véritable attente des épargnants : liberté de choix et efficacité fiscale !

 

Quelles sont les tendances observées sur le marché des entreprises ?

Vous avez raison, l’ambition de Pacte était de proposer un véhicule unique, accessible individuellement ou via l’entreprise. Du côté du PER d’entreprise, le succès est un peu plus nuancé. Le PER d’entreprise collectif (appelé aussi PERECO ou PERCOL) s’est rapidement imposé sur le marché des TPE/PME/Professionnels, en particulier grâce à sa version inter-entreprises qui a permis une transformation collective des anciens PERCO. L’articulation individuel/collectif répond bien aux enjeux des professions libérales et chefs d’entreprise qui réunissent en un seul produit leur ancien contrat Madelin et leur ancien PERCO avec la possibilité de mettre en place des stratégies à très forte valeur ajoutée. Le succès est un peu plus timide dans les grandes entreprises.

 

Comment expliquez-vous ces écarts ?

Dans les grandes entreprises, le PER est perçu par les partenaires sociaux comme un dispositif moins avantageux pour les salariés modestes : en effet, alors que les plus-values sur les versements volontaires des anciens PERCO étaient défiscalisées, sur le nouveau PERECO, ces plus-values sont soumises au PFU. Cette différence n’est pas forcément pénalisante pour les salariés qui peuvent profiter de la défiscalisation des versements volontaires. Mais pour les salariés modestes qui n’ont pas intérêt à défiscaliser leurs versements volontaires déclenchant l’abondement, le PER d’entreprise est vu comme moins attractif. Ce recul est un frein à la transformation.

Le PER issu de la loi PACTE comprend 3 compartiments compartiment individuel (successeur des contrats PERP et Madelin), compartiment collectif (successeur du PERCO) et compartiment catégoriel (successeur de l’article 83). Le PER Obligatoire permet l’activation des compartiments 1 et 3 et a vocation à remplacer les anciens contrats article 83. Malheureusement le compartiment catégoriel est un peu le parent pauvre de la réforme : il n’offre pas la sortie en capital, seule la rente viagère est possible à la retraite. Les entreprises sont de fait peu incitées à transférer les anciens plans article 83 en place vers ce nouveau PER Obligatoire, d’autant que les anciens article 83 peuvent bénéficier de garanties de tables de mortalité anciennes ou taux techniques élevés très favorables aux épargnants.

 

La crise sanitaire a-t-elle eu un impact ?

Il est certain que pour les entreprises, la crise sanitaire et le confinement ont ralenti la dynamique observée fin 2019 : en plus des inquiétudes des chefs d’entreprise pour la pérennité de leur activité, le simple fait de ne pas pouvoir réunir les salariés a été un frein à la mise en place de ces dispositifs négociés. Côté PERin en revanche, les acteurs et en particulier notre profession ont su s’adapter en accélérant la digitalisation des process, notamment de souscription. Les ouvertures de PER ont donc pu se poursuivre durant la pandémie.

 

Quelles sont, selon vous, les perspectives pour le PER ?

Tout d’abord je me réjouis de voir que notre profession a largement contribué au succès du PER. Le marché des TPE présente un axe de développement très fort.

Moins de 20 % d’entre-elles sont équipées. La loi PACTE constitue une formidable opportunité pour nos métiers car elle met au centre le devoir de conseil à chaque étape de la vie du produit. Qui mieux que les courtiers peut assumer un rôle de conseil à forte valeur ajoutée sur les plans fiscaux, sociaux, et patrimoniaux ?

 

Plus globalement quels enjeux sont portés par l’épargne salariale et l’épargne retraite ?

L’épargne salariale et l’épargne retraite répondent à des enjeux majeurs de société : soutenabilité de nos régimes de retraite, association des collaborateurs au partage de la valeur en entreprise, mais aussi financement de l’économie productive et des nécessaires transformations écologiques et numériques de notre pays.

Il faut en effet rappeler que l’investissement dans les plans d’épargne finance nos retraites futures, mais également nos entreprises et la croissance !